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Santé et Prévention

Le camp du square Forceval : le démantèlement, et après ?

Le camp de la porte de La Villette, où subsistaient depuis septembre 2021, dans des conditions indignes, des centaines de toxicomanes, a été évacué début octobre. Dorénavant, l’État doit offrir une réelle prise en charge sanitaire et sociale aux personnes qui le fréquentaient.
Article de Christophe Dutheil, publié dans Canal n°311, novembre 2022.

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Le camp du square Forceval a été évacué le 5 octobre

Le camp de crack de la porte de La Villette a été démantelé mercredi 5 octobre, exactement comme il avait été installé il y a un peu plus d’un an : dans l’opacité. «  J’ai appris l’intervention par un tweet du ministre de l’Intérieur qui n’a pas pris la peine d’informer au préalable les trois collectivités concernées  », indique Bertrand Kern, le maire, tout en relevant une relative constance dans le mépris dont fait preuve Gérald Darmanin vis-à-vis des habitants du nord-est francilien. Intervenue quelques jours après une importante mobilisation pour réclamer le démantèlement de la plus grande scène de consommation de crack à ciel ouvert d’Europe, cette évacuation est, malgré tout, un véritable soulagement pour les habitants des Quatre-Chemins comme pour les élus de Pantin, d’Aubervilliers, du XIXe arrondissement de Paris.

Un dialogue rétabli

Lundi 10 octobre, à l’issue d’une réunion organisée par Laurent Nuñez, le nouveau préfet de police de Paris, les édiles ont d’ailleurs tenu à saluer le rétablissement d’un dialogue constructif avec ce dernier. Ils ont eu l’assurance que la mobilisation des effectifs policiers sur le site serait durable, afin de prévenir toute réinstallation du camp. Les maires se sont enfin vu proposer de participer au Comité de pilotage institutionnel du Plan crack, une instance pilotée par l’État. Une certaine prudence s’impose toutefois, comme le souligne Dominique Gamard, membre du collectif 93 Anti-Crack, qui s’inquiète d’une «  intervention 100 % sécuritaire, stigmatisant injustement les migrants et dépourvue d’une réelle visée sanitaire  ». Et de fulminer : «  L’indifférence dont a fait preuve le ministre de la Santé début octobre est, à ce titre, éloquente.  »

Des réponses encore insuffisantes

Pour Bertrand Kern, la vigilance est désormais de mise : «  J’ai toujours dit qu’une évacuation devait être conditionnée à l’augmentation des moyens dédiés à la prise en charge médicale et hospitalière de ces publics. Particulièrement ceux dans une situation extrême avec des troubles psychiatriques importants et qui doivent être pris en charge de façon urgente.  » Le maire reconnaît cependant que quelques pas en avant ont été effectués : à l’issue de l’évacuation du square Forceval, 93 consommateurs ont, par exemple, été mis à l’abri, 200 bénéficient de soins infirmiers dans des «  espaces de repos  » ouverts en journée et 14 ont pu rejoindre des services hospitaliers d’addictologie ou des communautés thérapeutiques. Mais, pour les spécialistes, à l’instar de Médecins du monde, ces premières réponses médico-sociales restent insuffisantes, tout comme les efforts de prévention à l’intention des nouveaux usagers potentiels.

 

Quatre-Chemins : bientôt des effectifs de police en plus ?
Le 25 septembre 2020, Bertrand Kern écrivait à Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, pour réclamer le classement en Quartier de reconquête républicaine (QRR) de la partie pantinoise des Quatre-Chemins, exactement comme l’est la partie albertivillarienne du quartier. En effet, depuis 2019, le quartier Villette/Quatre-Chemins d’Aubervilliers est classé QRR sans inclure Pantin, alors que ces deux quartiers appartenaient pourtant à la même Zone de sécurité prioritaire (ZSP) jusqu’alors. Lundi 10 octobre, le maire a réitéré sa demande à l’occasion de la réunion avec le préfet de police Laurent Nuñez. Reconnu QRR, le secteur bénéficierait d’effectifs policiers renforcés, permettant de lutter plus efficacement contre certains faits délictueux sur la voie publique (trafics, vente de cigarettes de contrebande…) et à la police municipale de se concentrer sur ses missions de proximité. Ce renfort s’inscrirait en complément des nombreux investissements de la ville sur le quartier et d’une politique fondée sur la prévention et l’apprentissage de la citoyenneté plutôt que la répression. Jeudi 20 octobre, les élus réunis en conseil municipal ont voté un voeu, présenté par Françoise Kern, adjointe au maire déléguée à la Tranquillité publique et à la Sérénité urbaine, allant dans ce sens.