
Développement durable
Tout roule pour l’économie circulaire
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À l’entrée de ce gigantesque entrepôt de 13 000 mètres carrés, on est accueilli par une dizaine de balles de déchets – canettes, papiers, plastiques… – collectés et triés par Lemon tri. À côté, s’entassent des sacs de plâtre, bois, métal, lino ou gravats récupérés sur des chantiers par Tri’n’Collect. Il y a également là Weeedoit, spécialiste de la récupération des déchets informatiques ; Carton plein qui, comme son nom l’indique, prend en charge les cartons ; Les Valoristes, lesquels travaillent le bois recyclé ; l’atelier Cala qui le transforme en décor ou en mobilier, et, enfin, Névé, société de nettoyage écoresponsable.
Bienvenue à Cartier circulaire ! Inauguré en juin rue Cartier-Bresson, ce n’est rien de moins qu’une plateforme XXL de transformation, de recyclage et de réemploi des matériaux.

UNE VOLONTÉ POLITIQUE
« L’objectif de l’économie circulaire est de sortir du processus linéaire “On extrait, on produit, on vend, on consomme, on jette”, explique Emmanuelle Ledoux, directrice générale de l’Institut national de l’économie circulaire. Elle repose notamment, en France, sur la responsabilité élargie du producteur qui doit prendre en charge la fin de vie des objets qu’il conçoit. La loi AGEC (Anti gaspillage pour une économie circulaire) a augmenté le nombre de filières concernées et promeut le réemploi et le recyclage des déchets, la réparation de l’électroménager ou celle des chaussures. Au-delà de la conviction, très partagée, qu’on ne peut pas continuer à gaspiller les ressources, il s’agit d’un changement total de modèle. Si les industriels ont un grand rôle à jouer, certaines collectivités sont également très actives sur le tri, la valorisation des déchets ou la mise à disposition de locaux. »
Augustin Jaclin, cofondateur de Lemon tri, acquiesce : « Les espaces pour les activités comme les nôtres sont rares en première couronne car le mètre carré est cher. À Pantin, on sent une vraie volonté politique de soutenir l’économie sociale et solidaire (ESS) et les activités circulaires. »

La ville héberge en effet de nombreux acteurs spécialisés dans la vente d’articles de seconde main à l’image d’Emmaüs Coup de main ou de Biicou qui propose des équipements de puériculture d’occasion. Aux Ateliers Diderot, on trouve des champions de l’upcyling, dont certains misent sur l’innovation, tels les Matériaux urbains qui transforment les déchets organiques en mobilier.
Au centre d’activités de l’Ourcq, les créations à base de résidus de la production du lait de La Compagnie française des boutons s’arrachent, tandis que Les Ripeurs collectent des tonnes de déchets émanant de chantiers afin de les réemployer. De son côté, la Cyclofficine a redonné vie, en 2024, à 1 400 vélos et Les Alchimistes récupèrent, pour leur part, des couches usagées pour les transformer en compost. Enfin, Sinny&Ooko, à la tête de la Cité fertile, prévoit d’investir, fin 2025, la halle Magenta où elle organisera régulièrement des marchés de produits d’occasion.
des créations d'emplois

Cette économie qui, en France, permet un taux de 19,8 % d’utilisation circulaire des matériaux, contre 7,2 % dans le monde, a aussi pour vertu de favoriser la création d’emplois non délocalisables. « Dès lors qu’on décide de reconditionner, réparer, upcycler, cela se passe forcément près de chez nous. Cela peut coûter plus cher dans l’immédiat, mais il faut réintégrer tous les bénéfices associés sur le plan social et écologique », détaille Emmanuelle Ledoux.
De fait, de nombreuses associations ou entreprises de gestion des déchets, comme Lemon tri,EmmaüsCoup de main ou Carton plein, embauchent des personnes en insertion, parfois très éloignées de l’emploi.
Autre avancée de la loi AGEC : la collecte, désormais obligatoire, des déchets alimentaires des ménages. Est Ensemble récupérait déjà, à Pantin, ceux des cantines scolaires, des marchés forains et de certains commerces, soit 220 tonnes ramassées de février à août 2024.
Cette année, le territoire a en outre installé 51 bornes au sein desquelles 45 tonnes de détritus organiques ont été récoltées. Transformé par méthanisation en biogaz en Seine-et-Marne et dans l’Aube, le tout devient chauffage, carburant ou électricité.
LA RÉSERVE DES ARTS A DÉMÉNAGÉ
Malgré les propositions de nouveaux locaux effectuées par la ville, l’association de réemploi de matériaux a quitté Pantin fin août pour s’installer à Montreuil.
► Pour l’instant, sa nouvelle adresse est tenue secrète, le temps d’aménager son entrepôt. Depuis quelques mois, l’équipe de la Réserve des arts réinstalle les immenses volumes de bois, cuirs, plastiques ou métaux qu’elle collecte auprès d’acteurs culturels.
► Installée rue Cartier-Bresson en 2011, puis sur la ZAC de l’écoquartier en 2019, la Réserve des arts, qui remet en circulation 600 tonnes de matériaux par an, cherchait à investir un lieu pérenne pouvant accueillir du public.
► En attendant sa réouverture prévue cet hiver, vous pouvez d’ores et déjà prendre rendez-vous, en priorité pour des demandes de gros volumes et pour des projets spécifiques. Pour prendre rendez-vous : contact@lareservedesarts.org
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Agenda
- À l’occasion du Festival des alternatives, découvrez, durant tout le mois de novembre, de nombreux acteurs de l’économie circulaire.
- Dans le cadre de la Semaine européenne de réduction des déchets, Est Ensemble organise un Village zéro déchet, samedi 16 novembre, de 10.00 à 13.00 et de 14.00 à 17.30 à la bibliothèque Elsa-Triolet. Le même jour, de 10.00 à 13.30, une animation compostage est prévue au parc Stalingrad.
- Portes ouvertes mercredi 20 novembre à 14.00 chez Lemon tri et Les Valoristes. Au programme : visite de l’entrepôt et atelier Do It Yourself. Inscriptions : exploreparis.com
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Retrouvez les autres articles du dossier « Tout roule pour l’économie circulaire », réalisé par Catherine Portaluppi, Frédéric Fuzier, Christophe Dutheil et Guillaume Gesret, publié dans Canal n°331, novembre 2024
> « Un temple pour l’innovation circulaire »
> « L’innovation au service du bouton »
> « En ville, les charmes du réemploi »