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Urbanisme

L’écoquartier est sur les rails

Entre l’avenue Édouard-Vaillant, les rues Cartier-Bresson et Denis-Papin, 45 hectares de terrains, composés de friches ferroviaires et d’espaces bâtis, deviendront, d’ici à 2035, un écoquartier. Cet ensemble se conçoit avec les habitants, lesquels seront invités le mois prochain à prendre part à des balades exploratoires.
Article de Pascale Decressac, publié dans Canal n°310, octobre 2022.

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Début de la concertation en novembre

 

En 2011, plus de 600 Pantinois définissaient les fondamentaux de l’aménagement du futur écoquartier des Quatre-Chemins. Une décennie plus tard, après de longues négociations avec la SNCF portant sur le prix de vente des terrains, le projet entre dans sa phase opérationnelle.
En charge de sa conception pour le compte de la ville et d’Est Ensemble via l’aménageur SPL ensemble, l’agence LAQ vient en effet de publier un plan-guide, en partenariat avec les paysagistes de Alps et le bureau d’études MA-GEO. Fixant l’esprit, les ambitions et les principes d’organisation spatiale et urbaine du projet, ce document reprend les grandes lignes établies il y a un peu plus de 10 ans.
Le programme se veut respectueux de l’environnement et de l’identité du site. Ainsi, l’écoquartier abritera 6 hectares d’espaces verts. Un chiffre revu à la hausse par rapport à l’intention initiale ! Il conservera aussi une partie du bâti existant et assurera une mixité des usages entre logements, bureaux, commerces et équipements publics.
Fil conducteur, le développement durable sera pris en compte dans chaque mètre carré, ce site aspirant à inspirer la ville de demain. Une cité verte, sobre, équitable, sachant s’adapter aux enjeux environnementaux, sociaux et économiques à venir.
La physionomie de l’ensemble n’est toutefois pas totalement figée. Elle se nourrira des concertations menées avec les habitants, experts de leur quartier et de ses usages.
Après avoir découvert le site grâce à des balades exploratoires organisées en novembre, la consultation portera, en 2023, sur certains aspects qui donneront corps au projet. Vocation des espaces verts, apparence des bâtiments publics, qualité des aires de jeux...  la vox populi donnera des couleurs et de la vie à l’écoquartier !

Informations pratiques balades exploratoires :

  • Samedi 19 novembre à 10.30 (en présence de Bertrand Kern, le maire) et à 14.00 ; samedi 26 novembre à 10.30 et 14.00
  • Inscription obligatoire par mail à contact@spl-ensemble.fr

« Les habitants des Quatre-Chemins doivent savoir que cet écoquartier est d’ abord fait pour eux »

Un an après avoir été choisie pour concevoir l’écoquartier, l’agence d’urbanisme LAQ, en partenariat avec Alps paysagistes et le bureau d’études MA-GEO, vient d’éditer un plan-guide détaillant les grandes lignes du projet. L’occasion de demander à sa directrice, l’architecte-urbaniste Claire Schorter, et à Bertrand Kern, maire de Pantin, leur vision et leurs ambitions pour l’aménagement de ce site.

Qu’est-ce qu’un écoquartier ?
Claire Schorter : C’est un quartier ayant un impact minimal sur l’environnement lors de sa construction comme à l’usage. Il doit en effet encourager les comportements responsables au quotidien. Mixant les populations et les activités, chacun doit pouvoir s’y épanouir.

Bertrand Kern :  La notion d’écoquartier est née au début des années 2000 lorsqu’est apparue l’impossibilité de continuer à aménager la ville comme avant, c’est-à-dire en bétonnant et en ignorant la nature. Face au réchauffement climatique, on réalise en effet, depuis deux décennies, qu’il est nécessaire de concevoir l’urbanisme différemment.
À chaque étape de son aménagement, un écoquartier doit donc prendre en compte les impacts sur l’environnement. Il doit aussi permettre aux habitants de mieux vivre, à l’abri du froid l’hiver et de la chaleur l’été, grâce à des bâtiments bien isolés et à des espaces verts ombragés. C’est donc le retour de la nature en ville !

Comment cela se traduira-t-il aux Quatre-Chemins ?
C.S. : La réduction de l’impact environnemental passera par des constructions bas carbone, l’édification de bâtiments les plus passifs possible énergétiquement, l’utilisation de matériaux biosourcés ou issus du réemploi et la désimperméabilisation et la renaturation des sols de l’ancienne plateforme ferroviaire afin d’apporter fraîcheur et biodiversité.
Sur cette enclave encore peu traversée, la place de la voiture sera réduite et de nouvelles continuités piétonnes et cyclables construites, raccourcissant les distances entre les Quatre-Chemins et la gare. Autant d’éléments qui feront de l’écoquartier un endroit épanouissant dans lequel chacun se sentira bien dans son environnement.

L’édition du plan-guide de l’écoquartier est l’aboutissement d’un travail initié de longue date. Celui-ci a-t-il été pris en compte dans le nouveau document ?
B.K. : Bien sûr ! Dès mon premier mandat en 2001, ma priorité était de recoudre le tissu urbain marqué par de profondes fractures et de rapprocher le quartier des Quatre-Chemins du reste de la ville, dont il était séparé par le faisceau SNCF. En 2008, l’écoquartier fut pensé pour cela. L’agence TGTFP a ensuite réalisé un premier plan-guide en 2011 en s’appuyant sur l’avis des habitants qui avaient émis une centaine de préconisations. À l’époque, 90 % d’entre elles avaient été retenues. Aujourd’hui, la vocation première de l’écoquartier, tout comme les grandes lignes édictées avec les Pantinois, figurent dans le plan-guide réalisé par LAQ.

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce plan-guide ?
C.S. : D’abord, nous avons souhaité que la nature ait une place centrale dans le quartier. Outre le grand parc qui sera sa principale zone d’attractivité, nous avons étiré les espaces verts davantage qu’en 2011. Nous avons en effet imaginé des continuités piétonnes et paysagères diffuses qui donneront envie de sortir et rafraîchiront la ville. En matière de mobilité, les itinéraires piétons et les modes de déplacement doux seront privilégiés par rapport à la voiture. Nous avons par ailleurs tenu à conserver des empreintes de l’existant, qu’il s’agisse de traces ferroviaires ou de bâtiments emblématiques.
Si les grandes tendances imaginées dans le premier plan-guide demeurent, avec des bureaux principalement installés en limite de la voie ferrée et des habitations essentiellement en cœur de quartier, davantage de mixité a été introduite dans les différentes zones, l’idée étant que plusieurs îlots vivent tout au long de la journée.
La rue principale reliant les axes Édouard-Vaillant, Cartier-Bresson et Diderot constituera, avec les espaces verts, l’armature centrale du quartier. L’effacement du faisceau ferré sera facilité par la création d’un nouveau franchissement entre la piscine-conservatoire et le collège. Le quartier sera aussi maillé de trois lieux de vie à proximité du collège, de la halle accueillant le marché provisoire et de l’accès nord de la gare qui sera accessible directement depuis les Quatre-Chemins. C’est un autre acte fort du projet.

B.K : Les évolutions décidées par rapport au premier plan-guide sont en lien avec le renforcement des exigences environnementales. À titre d’exemple, l’espace vert est désormais agrandi et devient un accès vers le quartier des Quatre-Chemins. Rejoignant les rues Cartier-Bresson et Denis-Papin, il fédérera le quartier et fera le lien vers la gare.
En termes de logements, 33 % seront sociaux comme c’est le cas dans tous les projets entrepris à Pantin et l’introduction du bail réel solidaire (BRS) n’est pas exclue. Des logements aux prix intermédiaires et en accession libre, dont une part sera réservée aux Pantinois, compléteront l’offre, permettant un parcours résidentiel complet.
Les habitants des Quatre-Chemins doivent savoir que cet écoquartier est d’abord fait pour eux, même s’il attirera des personnes extérieures. Je suis convaincu qu’il aura un effet «  locomotive  » pour l’ensemble du quartier, le rendant désirable et initiant un renouvellement urbain plus profond jusqu’aux frontières de la ville.

Au-delà du lien géographique, comment l’écoquartier fera-t-il la jonction avec l’histoire du site ?
B.K. : Je m’attèle, pour chaque programme urbain que j’entreprends, à sauvegarder des témoignages de l’histoire. Ce sera le cas ici avec la conservation de la grande halle en bois jouxtant les voies ferrées et le quai aux Bestiaux d’où partit, en août 1944, le dernier train de déportés. La mise en valeur de ce site fait partie des réflexions qui seront menées avec un comité d’experts comprenant des anciens combattants et des architectes du patrimoine.

C.S. : Conserver des traces du passé est, pour moi, un principe. J’estime en effet que tout aménagement et tout bâtiment dont la destruction n’est pas indispensable doit demeurer.

Mais si le plan-guide est d’ores et déjà validé, quel sera le rôle de la concertation qui débute le 19 novembre ?
C.S. : Comprendre les parcours des habitants et des usagers, ce qui leur plaît et ce qui leur manque, est essentiel pour nous. Ils sont en effet les meilleurs experts de leur territoire. La concertation permettra ainsi d’entrer finement dans la conception des espaces. Leur parole donnera de l’épaisseur, de la consistance et de la vie au projet. Nous sommes de simples écrivains publics au service des usagers et s’imprégner de la vie locale fait partie de notre travail d’urbaniste.

B.K. : La concertation de 2011 devait préciser le contenu du projet. Celle qui débutera cet automne visera, par exemple, à déterminer la physionomie des espaces verts, des équipements publics ou des aires de jeu, les implantations des commerces, la possibilité de faire pousser une forêt urbaine… Écouter ce que les habitants ont à nous dire de leur futur lieu de vie est essentiel à toutes les phases du projet. La concertation ce n’est pas pour faire joli, cela nous permet de dessiner un quartier au plus proche des attentes et du quotidien des Pantinois. Nous avons défini les grandes lignes de l’écoquartier, maintenant on entre dans le concret !