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Culture et patrimoine

L'hôtel de ville de Pantin : un chantier hors norme s’achève

Vingt mois durant, 127 tonnes d’échafaudages ont ceinturé l’hôtel de ville qui, aujourd’hui, sort de sa chrysalide de métal. Alors que le chantier touche à sa fin, retour sur une opération exceptionnelle qui a permis à la maison du peuple de retrouver son éclat d’antan.
Article de Pascale Decressac, publié dans Canal n°302, décembre 2021.

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La maison du peuple retrouve son éclat 

40 000 ardoises, 47 m3 de pierre, 30 artisans s’activant simultanément du sol au toit, 6 millions d’euros investis… C’est bel et bien un chantier de taille qui s’achève avenue du Général-Leclerc. Construit en 1886, l’hôtel de ville a subi les outrages du temps, devenant une victime des assauts de la pollution automobile qui a fini par griser sa pierre dorée d’origine. «  C’est la première fois qu’une rénovation totale de sa façade est menée  », explique, en préambule, Bertrand Kern, le maire.
Emblématique de la Troisième République, cette bâtisse flamboyante n’avait en effet connu que deux restaurations partielles sous les mandats de Charles Auray et de Jean Lolive. Y réaliser des travaux de grande ampleur devenait urgent pour éviter une détérioration irréversible, notamment en raison de l’état de la toiture qui n’était plus étanche. S’ils étaient envisagés de longue date, le maire précise : «  Lors de mes premiers mandats, la priorité a été de rénover d’autres équipements publics plus essentiels à la population, notamment les écoles.  »

Un bâtiment, des défis
Inscrit à l’inventaire des monuments historiques depuis 2017, l’hôtel de ville est un édifice protégé. L’architecte, et l’ensemble des entreprises qui sont intervenues, ont donc dû respecter des règles strictes afin de ne pas le dénaturer. Les pierres ont par exemple été traitées au lait de chaux et les soudures réalisées au plomb.
L’autre défi a été d’orchestrer avec minutie l’organisation du chantier, lequel concernait chaque recoin de la bâtisse. Jennifer Khimoun, architecte de l’agence APGO, a endossé ce rôle, en lien avec les services de la ville. Elle détaille : «  Nous avons débuté en mai 2020 par la partie est. Il nous a alors fallu dépolluer, rénover la couverture, la façade, les gouttières, les chéneaux, la zinguerie et la plomberie. Nous avons également entièrement revu l’isolation. La deuxième phase des travaux a commencé en septembre 2020 avec la réfection des grilles et la mise en lumière du bâtiment.  »

Renaissance d’un joyau patrimonial
Tous les corps de métier travaillant simultanément avec des contraintes différentes, un autre challenge a dû être relevé : monter et démonter les échafaudages à mesure de l’avancée des opérations. Ainsi, l’est du parvis a été rénové durant l’été 2021, une fois le corset de métal de ce côté de la façade ôté. Quant à la partie ouest de la cour, elle sera empavée début 2022, quand l’intégralité des échafaudages sera retirée.
«  Pour ce qui est de la création de la plateforme permettant l’accès aux personnes à mobilité réduite, reprend Jennifer Khimoun, nous subissons, comme tout le monde actuellement, un problème d’approvisionnement en composants. Elle sera donc installée en février 2022.  »
Ne reste plus maintenant qu’à finaliser l’habillage lumineux du bâtiment et à restaurer son intérieur. Une opération qui débutera fin 2022… «  L’hôtel de ville appartient aux Pantinois. C’est là qu’ils se marient, reçoivent leur médaille du travail, leur bac ou leur brevet et que l’on commémore les cérémonies. Je suis donc ravi qu’ils puissent à nouveau profiter pleinement de ce joyau patrimonial  », conclut Bertrand Kern.

Ils ont participé à l’aventure…

Le chantier de réfection de l’hôtel de ville a simultanément mobilisé jusqu’à une trentaine d’artisans appartenant à différents corps de métier. Tailleurs de pierre, couvreurs, électriciens… Ils témoignent et racontent, en filigrane, l’histoire de ce chantier pas comme les autres.

Erns Jn Baptiste, chargé de la dépollution des murs

«  Le carburant au plomb qui, autrefois, était utilisé par les véhicules, a encrassé le bâtiment. Nous avons donc apposé sur les murs des cataplasmes à base d’argile verte. Une fois secs, ils ont ramolli les salissures qui ont pu être retirées. Sur les parties basses, très noircies, nous avons effectué, en complément, un sablage. Elles ont ainsi été nettoyées via un compresseur sous pression qui projette une poussière très fine. Pour réaliser cette opération, il faut porter un masque de protection ventilé et calfeutrer la zone de travail.  »

José Cereida, tailleur de pierre

«  Nous avons retiré et refait tous les joints, puis remplacé les pierres abîmées par de nouvelles, partiellement taillées sur place. Les balustrades et corniches ont également été démontées et remplacées en grande partie. Tous les éléments d’ornementation du toit ont aussi été déposés, parfois réparés, puis reposés. Certaines pierres, fendues, ont ensuite été goujonnées, c’est-à-dire creusées puis comblées par de la résine. La couleur de la façade, qui comporte quatre sortes de pierres, a enfin été uniformisée grâce à une patine de ton moyen.  »

Malo Le Barazer, couvreur

«  Je travaille ici depuis 13 mois. Nous avons d’abord retiré toutes les vieilles ardoises pour les remplacer à l’identique. Nous avons également réparé les gouttières, les supports, les ornements. Sur chaque portion du toit, nous sommes allés du bas vers le haut. Au niveau des lucarnes et contre les murs, nous avons réalisé des soudures et des raccords au plomb pour plus de solidité. Afin d’assurer l’étanchéité de la toiture, il a fallu veiller à ce que les ardoises se chevauchent correctement. En fonction des endroits, nous avons donc dû les tailler avant de les fixer au moyen de crochets.  »

Jérémy Meignen, électricien

«  Pour la mise en lumière du bâtiment, nous avons mis en place plus de 70 points lumineux utilisant des LED. Certains ont pu être accrochés en montant sur les échafaudages mais, sur les zones où il n’y en avait pas, nous avons dû utiliser une nacelle. Pour ne pas dénaturer la façade, les câbles devaient être cachés. Et, comme il est aussi interdit de percer la pierre, des soudeurs ont dû installer des systèmes d’attache en zinc.  »