© ville de Pantin 

Environnement

Réintroduire la nature à Pantin : plus qu'un objectif !

À Pantin, de nombreuses actions sont lancées, ou sur le point de l’être, pour réintroduire la faune et la flore dans un paysage urbain très dense.Une dynamique à la fois institutionnelle et citoyenne qui laisse espérer l’avènement d’une ville plus verte, plus apaisée et plus saine.
Extrait du dossier, " La nature en ville ", réalisé par Guillaume Gesret, publié dans Canal n°294, mars 2021.

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Dans une cité marquée par son passé industriel et les politiques d’aménagement des Trente glorieuses qui imposaient de bétonner et de bitumer, réintroduire la nature est un défi. Un défi impératif face aux impacts du dérèglement climatique et aux attentes des habitants qui, de plus en plus, aspirent à renouer avec elle. «  La nature est absolument essentielle pour la qualité de vie des citadins, affirme Nathalie Machon, chercheuse et professeure d’écologie urbaine au Muséum national d’histoire naturelle. Outre le fait qu’elle embellit, elle offre des services incomparables et gratuits : elle atténue les températures lors des épisodes caniculaires, elle améliore la qualité de l’air, des sols et de l’eau. Ses bienfaits ont aussi été démontrés sur la santé humaine.  »

Une ville qui respire
Nul besoin d’aller chercher plus loin les raisons pour lesquelles la ville a, lors du précédent mandat, agrandi le parc des Courtillières – il s’étend dorénavant sur plus de 4 hectares –, créé deux espaces verts aux Quatre-Chemins – le square Anne-Frank (1 000 m2) ouvert depuis 2019 et le parc Diderot (2,5 hectares) dont une partie sera accessible dès ce printemps –, planté des arbres à la faveur de chaque requalification de rue, accordé de nombreux permis de végétaliser. Résultat : Pantin compte aujourd’hui environ 6 000 arbres et la surface des espaces verts y a progressé de près de 10 % depuis 2001.
Bertrand Kern, le maire, en est en effet persuadé : «  Il faut faire respirer notre ville, créer des îlots de fraîcheur, continuer d’agrandir les parcs, planter des arbres dès qu’on le peut. Le développement de cette nature est possible : il doit être pensé de façon systématique, à chaque réalisation dans l’espace public, de manière à l’accélérer.  » Dans les prochains mois, le quai de l’Ourcq sera ainsi piétonnisé et enherbé, des cours Oasis, espaces arborés pouvant être partagés, seront créées dans les écoles, des jardins de pluie s’autoalimenteront avec la récupération des précipitations, la place de la Pointe bénéficiera d’un verdissement, des radeaux végétalisés flotteront sur le canal, le quartier du Port accueillera un square... Dans un futur plus lointain, «  un bois urbain d’environ 2,5 hectares prendra place au cœur de l’écoquartier  », se félicite le maire. Une bonne nouvelle pour la biodiversité.

Faire renaître la biodiversité
Car, comme le souligne Nathalie Machon, «  le développement de la nature en ville permet de recréer des écosystèmes fonctionnels où les espèces animales et végétales interagissent et produisent de meilleurs services.  » Et c’est tout le sens du travail du pôle Espaces verts de la ville qui, ces dernières années, n’a cessé d’innover pour faire renaître cette biodiversité. Didier Méreau, son responsable, explique : «  Nous avons proscrit les pesticides et éteint l’éclairage public la nuit dans les parcs afin que les oiseaux puissent dormir en toute quiétude. Et, lorsque l’on crée un bosquet derrière le stade Charles-Auray, on utilise la méthode Miyawaki qui consiste à faire pousser une forêt en un temps record sur des terrains urbanisés ou dégradés.  » Ainsi, les rouges-gorges, mésanges et autres chauve-souris qui avaient déserté Pantin sont de retour. «  Nous voyons même des écureuils, des fouines et des traces de renard dans le parc Barbusse  », rapporte l’un des jardiniers municipaux.
Reste maintenant à assurer une cohabitation harmonieuse entre les anciens et ces nouveaux habitants. Pour cela, direction la Cité fertile, les jardins partagés ou encore les écoles qui ne lésinent jamais dès lors qu’il s’agit de former les écocitoyens d’aujourd’hui et de demain.

QUESTION DIRECTE À…

Bertrand Kern, maire de Pantin

Quelle est votre position sur le devenir des jardins familiaux du Fort d’Aubervilliers ?
J’ai entendu la mobilisation liée à l’aménagement d’une gare de la future ligne 15 du Grand Paris Express, d’un écoquartier et d’une piscine dans le secteur du Fort d’Aubervilliers. Selon moi, l’arrivée d’une gare à cet endroit est une bonne nouvelle pour les habitants des Courtillières. Quant à la construction de logements dans le cadre de l’écoquartier, elle répond aux besoins des habitants des portes de Paris.
Toutefois, quand j’ai pris connaissance de ces projets, il y a environ cinq ans, j’ai fait part de mes remarques à la précédente équipe municipale d’Aubervilliers. Je disais alors qu’un écoquartier ne devait pas être trop dense et que, si jamais quelques jardins venaient à disparaître, l’engagement devait être pris de les reconstituer dans la même zone.
Aujourd’hui, je le maintiens : les 13 % de parcelles supprimées devraient être recréés. Je précise, contrairement à ce qu’il a été dit, qu’aucun potager du Fort d’Aubervilliers ne se trouve sur le territoire de Pantin. Je ne suis donc pas dans la position de décider, mais je pense qu’il convient certainement d’expliquer et de mieux communiquer autour de ces nouveaux aménagements.
Ma seule préoccupation en tant que maire de Pantin, ce sont les Pantinoises et les Pantinois. J’estime que la gare du Grand Paris, les logements et la future piscine seront plébiscités par les habitants des Courtillières. Et c’est également à eux que je pense quand je projette de créer des jardins partagés dans leur quartier.

3 QUESTIONS À…

Mirjam Rudin, adjointe au maire, déléguée à la Nature en ville, aux Déplacements, aux Espaces publics et aux Espaces verts

Canal : Pourquoi l’équipe municipale souhaite-t-elle tant verdir Pantin ?
Mirjam Rudin : Pour lutter contre le réchauffement climatique, nous pensons qu’il faut planter massivement des arbres dans les rues, créer des cours oasis dans les écoles, concevoir une forêt urbaine au sein du futur écoquartier… Il en va d’abord de notre santé. Mais la nature permet également d’apaiser nos tensions. Les espaces verts participent en effet à l’équilibre psychique des adultes comme des enfants. Accroître la nature en ville, ce n’est donc absolument pas que cosmétique.
 
Mais planter des arbres, créer des espaces verts, nécessite de sanctuariser de rares mètres carrés qui peuvent être convoités par les promoteurs immobiliers autant que par les automobilistes…
M.R. : C’est vrai que nous devons reconquérir de l’espace. Donner de la place aux arbres pourrait en effet se faire aux dépens de certaines places de stationnement, de certains projets immobiliers. Préserver la biodiversité implique donc, parfois, quelques nuisances pour certains usagers. Mais ces désagréments sont mineurs par rapport aux bienfaits que la nature procure. Et puis, l’expansion de la nature en ville se joue aussi à petite échelle. Nous devons, par exemple, planter des arbres et des végétaux sur les bandes Vigipirate se trouvant devant les écoles et les gymnases, verdir certaines places publiques trop minérales, soutenir les initiatives d’habitants qui désirent créer des jardins partagés, leur délivrer des permis de végétaliser leur rue... Pour moi, chaque bac planté est une petite victoire.

Faut-il encore convaincre les Pantinois des bienfaits de cette entreprise ?
M.R. : Oui et c’est même essentiel. Imposer la végétalisation de la ville sans information ni consentement peut être contre-productif. Nous devons donc associer les Pantinois aux prises de décisions pour qu’elles soient comprises et acceptées. Si nous proposons de supprimer des places de stationnement au profit des arbres, si nous transformons des voies en «  rues jardin  », il faut absolument faire de la pédagogie. 

À l’écoute de la nature

Parce que développer la nature en ville signifie aussi lui prodiguer un entretien qui la respecte, Gail Schroeder, jardinière municipale, a vu son métier évoluer. Elle témoigne.

Gail Schroeder, qui a grandi dans la campagne de la banlieue de Détroit (Michigan), exerce le métier de jardinière depuis trente ans. «  J’ai découvert cette profession passionnante un été, alors que j’étais étudiante en littérature américaine. Ça m’a tellement plu que j’ai quitté la faculté pour l’embrasser.  »
Arrivée en France en 2004, la franco-américaine travaille, dans un premier temps, au sein du service des espaces verts de la ville d’Arcueil, avant de rejoindre Pantin il y a trois ans. «  J’aime mon métier car je suis à l’extérieur toute l’année. Je vois la nature changer en permanence. Regarder les écureuils courir dans le parc Barbusse, me sentir proche des arbres et des fleurs me fait du bien, tout simplement.  »

Un métier plus vert que vert
Autre motif de satisfaction pour la jardinière : l’évolution de sa profession ces dernières années. «  Aujourd’hui, la ville pratique la gestion différenciée et raisonnée. Notre approche professionnelle est donc plus respectueuse de l’environnement et de la biodiversité.  » Les jardiniers municipaux ne tondent donc plus le gazon sans réfléchir. Quant aux herbes que l’on qualifie parfois de mauvaises, elles ne sont plus systématiquement arrachées. «  Elles servent de refuge aux insectes, précise Gail. Et, pour qu’il y ait des oiseaux, il faut des insectes !  » CQFD.
Cette démarche écologique, entreprise par la ville il y a de nombreuses années, a été récompensée. En 2019, Pantin s’est en effet vu décerner le label Écojardin pour la gestion exemplaire de 29 de ses espaces verts. En 2020,  quinze sites supplémentaires ont été distingués. «  C’est une grande fierté pour nous !  », conclut-elle.

Le bonheur est dans le jardin

À Pantin, les jardins partagés connaissent un succès grandissant. Ainsi, les habitants qui expriment le besoin de renouer avec la terre forment des collectifs et des associations pour créer leur potager commun. La ville les aide ensuite à se lancer, en fournissant du matériel et l’expertise des agents des espaces verts.
Le dernier lieu de culture ainsi créé, baptisé La Petite Pensée florissante, se situe à côté de l’école Hélène-Cochennec, au pied de la résidence sociale de l’avenue Anatole-France, dans le secteur Raymond-Queneau. Depuis le mois de juin, les habitants de tous âges se retroussent les manches pour y faire pousser des légumes, des fruits, des aromates et des fleurs. Si cet espace de convivialité enchante les adhérents, il profite aussi à tout le voisinage.
Ailleurs, d’autres potagers de ce type mobilisent des mordus du jardinage. C’est le cas de Pousse Ensemble, fort de ses 4 000 m2 implantés à la lisière de la forêt de Romainville, et du jardin Banane Pantin, situé rue Honoré dans le quartier des Quatre-Chemins.

ZOOM SUR… Le verdissement par le PLUi

Le droit est un des leviers à actionner lorsque l’on désire développer la nature en ville. À travers leur plan local d’urbanisme (PLU), les collectivités parviennent ainsi à imposer des obligations «  vertes  » aux particuliers, bailleurs sociaux et promoteurs qui bâtissent ou réhabilitent.
Et c’est exactement ce qu’a fait Est Ensemble l’année dernière lorsqu’il s’est agi de définir son nouveau PLUi (i signifiant intercommunal). Encouragé par la ville, l’établissement public territorial a en effet intégré, dans ce document cadre qui fixe les règles de construction au sein du territoire, des mesures permettant de lutter contre le réchauffement climatique. Par exemple, pour obtenir un permis de construire, il est dorénavant obligatoire de végétaliser au moins 35 % de la parcelle à bâtir, dont une partie en pleine terre. Ce verdissement peut donc prendre la forme d’une pelouse parsemée de fleurs ou de toits terrasses végétalisés.
Deux autres règles s’inscrivent dans cette volonté de consacrer la place de la nature en ville : pour 100 m2 de pleine terre sur un terrain, le maître d’ouvrage doit planter un arbre à grand développement, c’est-à-dire de plus de 15 mètres de haut au terme de sa croissance. Par ailleurs, si un arbre de ce type est arraché dans le cadre d’une construction ou d’une rénovation, deux autres sont à restituer. Des mesures qui, bien évidemment, valent aussi pour les équipements publics.