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Musique

Le nouveau conservatoire Jacques-Higelin

Depuis le 19 septembre, le nouveau conservatoire Jacques-Higelin accueille, sur 6 600 m2, 1 300 élèves. Présentation d’un équipement qui offre des conditions optimales d’apprentissage.
Extrait du dossier réalisé par Pascale Decressac, Hana Levy, Guillaume Gesret et Tiphaine Cariou, publié dans Canal n°310, octobre 2022.

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Élèves et profs se jettent à l’eau

Théâtre, danse, musique, arts plastiques... le nouveau conservatoire regroupe désormais toutes ces disciplines auparavant disséminées dans différents lieux. «  Cela permettra davantage de transversalité  », assure Laurie Merle, responsable de l’Action culturelle et de la Diffusion.
Parmi les 1 300 élèves, 400 musiciens bénéficient de 18 salles de formation spécialement conçues pour la pratique de leur art, de trois studios d’enregistrement et d’une salle d’orchestre pouvant accueillir 70 instrumentistes. Quant à l’auditorium de 250 places, il leur offrira la possibilité de se produire sur scène dans les mêmes conditions que les professionnels.
Au conservatoire, l’apprentissage de la musique demande rigueur et sérieux. Si les mélomanes y apprennent évidemment à jouer d’un instrument, ils suivent également des cours de formation musicale et sont engagés dans une pratique collective (chorale ou orchestre, en fonction des spécialités). Outre l’enseignement d’une vingtaine de disciplines «  classiques  », on peut y prendre des cours de percussions du monde, à l’image de la batucada et des percussions iraniennes. L’équipement pantinois possède par ailleurs le département de musique baroque le plus développé d’Est Ensemble. On s’y familiarise ainsi  avec le luth, le traverso, le clavecin ou encore le violoncelle baroque.

Ouvrir le champ des possibles

Autres disciplines qui se démarquent par leur originalité, la musique assistée par ordinateur (MAO) et la composition électroacoustique. «  Pantin a été la première ville, avec Marseille à les proposer  », précise Jonathan Prager, professeur.
Quant à la musique acousmatique – qui consiste à manipuler des sons fixés sur un support –, elle se situe à la croisée des arts. Grâce au nouvel équipement, les concerts, cette expérience unique souvent qualifiée de «  cinéma pour les oreilles  », pourront désormais se dérouler non seulement à la salle Jacques-Brel, mais aussi dans l’auditorium de l’avenue du Général-Leclerc.
Dirigeant le département de MAO, Joseph Escribe, qui dispose enfin d’une salle dédiée, voit, lui aussi, s’ouvrir le champ des possibles au-delà des frontières du conservatoire puisque ses grands élèves animeront , dans la piscine, la soirée clubbing prévu pour l’inauguration de ce lieu hybride que certains surnomment le «  piscinatoire  ». «  J’adore l’idée de pouvoir monter des projets communs aux deux lieux et d’imaginer des installations dans le bassin !  », conclut-il.

Jacques-Higelin, un nom qui n’est pas tombé du ciel

Si le nouveau conservatoire porte le nom de Jacques-Higelin, c’est d’abord parce que l’artiste, à la fois auteur, compositeur et interprète, a résidé à Pantin de 1996 jusqu’à son décès, en 2018. C’est aussi et surtout parce qu’«  il était très content d’y vivre  », comme le souligne Aziza Higelin, la veuve de celui à qui l’on doit des perles du répertoire de la chanson française. Ainsi, en 2013, il avait nommé son avant-dernier album Beau repaire, du nom de la rue où il demeurait.
«  Je souhaitais qu’un lieu de la commune porte son nom, ajoute Aziza Higelin qui vit toujours à Pantin où son mari lui a passé la bague au doigt. J’en ai parlé à Bertrand Kern, le maire, qui a tenu sa promesse. Ma fille Izïa et moi sommes aujourd’hui très touchées.  » Izïa, justement, qui a suivi les traces artistiques de son père, a même fréquenté le conservatoire qui porte désormais son nom.
«  Jacques Higelin a maintes fois prouvé son attachement à la ville, notamment lors de la première Fête de la musique pantinoise. Le 21 juin 2001, il avait donné un concert gratuit  », se souvient Bertrand Kern. Le chanteur avait également répété Tombé du ciel au conservatoire avec une classe de l’école Sadi-Carnot qu’il avait ensuite conviée sur scène. «  Nous partagions les mêmes valeurs d’égalité, de solidarité et de tolérance  », résume l’édile.

Inauguration XXL

Si vous souhaitez découvrir le conservatoire et la piscine contiguë, la journée inaugurale du 15 octobre est à marquer d’une pierre blanche. En prime, des animations exceptionnelles et un conseil : n’oubliez pas votre maillot de bain !
Dès 9.00, le spectacle-concert La Tête dans l’eau attirera les familles dans le bassin dédié aux loisirs, tandis que les adultes pourront participer à des séances d’aquafitness au sein du bassin de 33 mètres.
Dans le salon qui relie les deux équipements, le public plongera ensuite avec bonheur dans les méandres de l’électroacoustique, alors qu’au conservatoire – que l’on pourra visiter tout au long de la journée – on s’émerveillera devant la poétique création Sous la neige, accessible dès 6 mois.
Durant l’après-midi, l’équipe de la piscine, où des structures gonflables seront installées sur l’eau, proposera une initiation à la plongée, un spectacle de danse synchronisée ainsi qu’une féérie musicale dans des bulles. Pendant ce temps, des créations théâtrales et chorégraphiques seront à découvrir au conservatoire.
Prévue à 18.30, l’inauguration officielle par Bertrand Kern, maire de Pantin, et Patrice Bessac, président d’Est Ensemble, sera suivie, à 19.30, d’un concert hommage en plein air. Des amis et la famille de l’artiste – Izîa, Jeanne Cherhal, Sonia Wieder-Atherton -– s’y produiront, tout comme des enfants des centres de loisirs.
En clôture de cette journée, Anaïs de Faria et Edwin Fardini, d’anciens élèves devenus professionnels, donneront un concert de chant lyrique à l’auditorium. Un récital suivi d’une soirée clubbing à la piscine.

Informations pratiques :

Comme une deuxième maison

Entrée comme élève au Conservatoire à rayonnement départemental (CRD) de Pantin en 1975, Céline Valadez y enseigne aujourd’hui le solfège. La pétulante franco-mexicaine revient sur ses 47 ans de vie commune avec l’établissement dont les nouveaux locaux seront inaugurés le 15 octobre.

Céline Valadez a dû trier maracas et partitions pour investir les locaux flambant neufs du nouveau bâtiment qui, depuis le 19 septembre, abrite le conservatoire Jacques-Higelin. Il a aussi fallu se séparer d’une partie des costumes des spectacles et de tout un petit bazar du quotidien. «  On en accumule des choses en 30 ans ! Ici, c’est ma deuxième maison et celle de ma fille…  »  
Alors qu’une nouvelle ère s’ouvre pour le conservatoire, Céline est la gardienne de sa mémoire. Lorsqu’elle y entre, l’établissement est installé dans une maison en meulière, à la place de l’école maternelle La Marine. En 1976, il déménage au sein de l’école Sadi-Carnot. Très vite les 300 élèves d’alors – ils sont 1300 aujourd’hui – sont à l’étroit. «  Déjà en 2007, on évoquait la possibilité d’investir un autre espace !, se souvient-elle. Je suis sûre qu’une histoire inédite va s’écrire avenue du Général-Leclerc. Ce lieu a en effet été conçu pour nous.  »

Des années fondatrices

Lorsqu’elle entre au conservatoire, Mai 68 est passé par là. «  Le solfège était aboli ; le corporel devenait aussi important que la formation musicale. Mais certains n’étaient pas prêts à danser en cours de musique !  » Jusqu’en 1986, elle y étudie tour à tour le piano, les percussions, la contrebasse, le violon et le chant qu’elle découvre à l’âge de 20 ans.
La mélomane doit beaucoup au charismatique directeur de l’époque, Sergio Ortéga. En poste pendant 22 ans, le Chilien désacralise alors la musique, la faisant sortir des murs en organisant des concerts dans les quartiers et en prônant un enseignement transversal. Tous les deux ans, il compose et monte des opéras pour enfants dans lesquels les élèves du conservatoire sont totalement impliqués. «  J’avais 13-14 ans quand j’ai chanté pour la première fois dans un de ceux-là et ce fut jubilatoire  », explique Céline Valadez
Elle qui est mexicaine par son père se plaît dans ce repaire de Sud-Américains talentueux… «  J’ai proposé des cours de solfège pour choristes. Ortéga m’a fait confiance alors que je n’avais que 21 ans !  » Et, une fois son diplôme en poche en 2010, la soprano enseigne le chant. Depuis 2017, celle qui dirige de nombreuses chorales officie également en classe à horaires aménagés musique aux Quatre-Chemins. Elle y fait chanter des élèves du CE2 au CM2. «  La boucle est bouclée puisque c’est là où j’ai grandi !  »

Un éveil multidisciplinaire

Mais Céline Valadez enseigne principalement le solfège et s’étonne de la mauvaise réputation de cette discipline. «  C’est une place que l’on ne m’envie pas. Le solfège est comme une langue étrangère : lire et écrire la musique est un passage obligé mais c’est l’oralité qui prime. Il s’expérimente en mouvement et dans l’improvisation. Dans ma salle, j’ai demandé à ce qu’il n’y ait ni tables, ni chaises, ni pupitres.  »
Grâce aux disciplines regroupées dans le nouvel établissement, Céline Valadez espère transformer l’éveil musical en une initiation artistique globale mêlant dessin, sculpture, musique, théâtre et danse. «  J’aimerais que ce soit un vrai lieu d’échange, une maison ouverte  », conclut-elle.

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